Un génie de l’orchestration, un révolutionnaire en devenir, des rythmiques basques de zortzico, l’odeur de la guerre, un camion nommé « Adélaïde », une passacaille qui s’entend passar por la calle, des anarchistes planqués partout, le grand Maurice Joyeux qui écoute le concert, la maladie qui s’invite encore dans tout ça.
Opération M.A.U.R.I.C.E., c’est un spectacle musical pour 7 interprètes sur la grande thématique de l’engagement, traitée de façon intime. On y suit deux destins croisés, celui de Maurice Ravel et sa résolution d’aller combattre au front pendant 14-18, et celui de Maurice Joyeux, anarchiste militant et déserteur de 39-45. L’écriture musicale est un mélange de nos compositions, jazz et chansons, et du trio violon violoncelle piano de Ravel réarrangé.
La première guerre mondiale pointe le bout de son nez. Ravel, tout maigre et freluquet, se fait gentiment remercier quand il tente de s’engager dans l’aviation. Il lui manque quelques centimètres ou quelques kilos et, pour lui, c’est un drame. Il ne peut pas laisser les jeunes hommes français aller à la guerre sans rien faire, sinon écrire de la jolie musique sur du beau papier. D’une traite, il écrit son Trio. Il parviendra quand même, en faisant des pieds et des mains (ça ne le change pas de son piano) à entrer dans l’armée au chef d’un camion 10 fois plus gros que lui, qu’il nommera Adelaïde.
Un autre Maurice frappe à la porte, en fait non, il n’est pas du genre à attendre la permission : c’est Maurice Joyeux, antimilitariste anarchiste de la première heure, une vie passée à militer pour l’ordre sans le pouvoir et à se faire enfermer. Lui est appelé sous les drapeaux de la deuxième guerre mondiale et s’en extirpera bec et ongles.
Deux hommes, qui ne partagent que leur prénom, deux visions saillantes de la question de l’engagement et du patriotisme.
Musicalement, les interprètes font se rencontrer les deux hommes. De Ravel, son génie de l’orchestration. Ces rythmiques basques Zortzico de son Trio, ils extrapolent et voguent sur les rives du 3e mouvement. Pour Joyeux, ils cherchent un mode de composition anarchiste de la musique, à partir d’improvisations collectives libres. Un dialogue fictif entre eux, un face à face sous forme de digression poétique et musicale.